Asie : la pluie pour seul espoir


 L'Indonésie continue d'être ravagée par les incendies qui semblent même s'étendre. Le nuage de fumée couvre une bonne partie de l'Asie du sud-est, posant de graves problèmes sanitaires.
 La superficie totale de forêts, savanes et plantations industrielles, affectée par le feu en Indonésie, dépasse aujourd'hui les 600 000 hectares et s'approche de 800 000, selon les plus récentes observations satellitaires. Loin de diminuer, les foyers sont en augmentation aussi bien sur Sumatra que Kalimantan, la partie indonésienne de Bornéo. La chape de fumée de ces incendies, dont les premiers ont été signalés il y a plus de deux mois, s'étend maintenant du sud de la Thaïlande aux Philippines.

Le facteur « El Nino »

 Les experts sont perplexes sur la meilleure façon d'y remédier en l'absence des pluies saisonnières qui se chargent habituellement d'éteindre ces feux. Ceux-ci sont allumés volontairement en fin de saison sèche, par les autochtones pour pratiquer la culture sur brûlis, et par les grandes exploitations pour nettoyer les forêts une fois qu'ont été abattus tous les bois précieux. Ces grandes compagnies sont accusées d'être à l'origine de 80 % des incendies alors que cette méthode, beaucoup moins coûteuse que le défrichage, est interdite.

 Cette année, comme en 1994, la situation a été aggravée par « el Nino », phénomène périodique né dans l'Océan pacifique qui affecte le climat global (tant en Amérique du Sud qu'en Asie) et se traduit, en Indonésie, par des sécheresses sévères. Celle-ci est la plus grave depuis 50 ans.

 Le président Suharto, qui la semaine dernière présentait les excuses de l'Indonésie à ses voisins, a annoncé l'attribution d'un million de dollars et la mobilisation de 8 000 pompiers. « C'est trop peu et trop tard », estime un écologiste indonésien. Pour M. Babar Ali, le président du Fonds mondial pour la nature (WWF), « ce dont nous avons besoin, c'est une bonne et épaisse pluie... mais rien de tel n'est annoncé ».

 Pour la seule Indonésie, 20 millions de personnes sont affectées et plus de 30 000 souffrent de problèmes respiratoires. 15 000 autres victimes sont recensées en Malaisie et, partout, les écoles ont été fermées. Les autorités évoquent la possibilité d'avoir à évacuer des dizaines de milliers de personnes.

 Des centaines cherchaient hier à quitter la province de Sarawak, dans l'est de la Malaisie, après la réouverture de l'aéroport fermé depuis une semaine en raison des fumées venues d'Indonésie. « L'air est irrespirable et me rend malade » racontait Tanja Steinhart, une Allemande de 26 ans. L'Office du tourisme s'est résigné à recommander aux touristes de reporter leurs séjours. C'est un coup très dur pour le Sarawak, qui mise sur le tourisme vert : « Toute cette fumée balaie ce concept », reconnaît un guide.

Pas d'influence sur le climat

 Concernant le climat de la Terre, des experts français estiment en revanche que l'impact sera « nul ». S'il est dramatique dans les pays touchés -baisse de température, pluies acides, effets catastrophiques sur les poumons etc.-, les panaches de fumée restent dans la basse et la moyenne atmosphère sans atteindre la stratosphère comme cela s'était produit lors de l'éruption du mont Pinatubo aux Philippines. Selon le géochimiste Jean-Claude Duplessy, du laboratoire CEA-CNRS à Gif-sur-Yvette : « Les poussières indonésiennes pourront redescendre un jour sur la France mais nous ne nous en rendrons pas compte, cette pollution sera mélangée aux autres... »
© Dernières Nouvelles D'Alsace, Vendredi 26 Septembre 1997.


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